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Une Souris et des Hommes

21 mars 2010

France/Guyane - Dirty Paradise, pour introduire l'orpaillage

Dirty Paradise, de Daniel Schweizer, cinéaste genevois, est un documentaire de haute qualité cinématographique, parlant de l'orpaillage clandestin et ses conséquences sur la vie des amérindiens wayana dans le haut-Maroni. Ce film a été diffusé dans le cadre du festival du film et forum international sur les droits humains, et c'est avec un peu de plaisir mais aussi un peu de peine que je le découvrais en ce triste dimanche grisâtre de mars. Un peu de plaisir, car la qualité cinématographique de ce documentaire est indéniable. Des images splendides, des entretiens de qualité et un traitement du sujet plutôt complet. Et de la peine car la lutte contre ce fléau environnemental et sanitaire pourrait avoir des conséquences irréversibles pour les villages concernés, et pour l'environnement autrement préservé du territoire guyanais. Je suis revenu de Cayenne il y a maintenant quelques mois. Quelque soit l'endroit et le poste concerné, un contrat d'un an est court, très court, mais comme il me reste près de 40 ans à cotiser, des opportunités pour retravailler dans ce beau département habitées par de chouettes personnes, il y en aura probablement d'autres !  

Allez, je retranscris avec une précision approximative les grandes lignes du débat qui a suivi ce film et qui s'est déroulé en présence du réalisateur, de Michel, un amérindien wayana venu à Genève pour témoigner avec quelques autres compères, et de deux ou trois autres professionnels ayant consacré leur vie professionnelle au travail avec les petites communautés minoritaires au sein de nombreux pays en Europe, en Amérique du Sud ou ailleurs. Ce débat, d'environ 45 minutes, m'a semblé assez juste tant par les avis de Michel sur la situation des siens que par les réflexions sur les problèmes dans la vie de tous les jours des amérindiens du Haut-Maroni. J'en profite pour glisser quelques photos de cette région de Guyane, prises par mes collègues de l'époque. 

Lutter contre l'orpaillage: quelles solutions ? C'est la première question sur laquelle le débat a porté. Pour Michel, la lutte est quasiment impossible compte-tenu du statut international des eaux du Maroni, de la passoire totale que constituent les frontières de la Guyane, du nombre important de chercheurs d'or (peut-être 10 000 garimperos), de la sporadicité des opérations de l'armée (Anaconda, Harpie etc).

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Vue de Maripasoula (photo prise par mes anciens collègues)

Face à ces difficultés géographiques, tout le monde s'accorde à dire que la France ne pourra probablement pas s'en sortir seule pour supprimer ce fléau irréversible. Alors, quelles solutions ? la coopération, et pas qu'un peu. Cet argument, je l'avais déjà entendu régulièrement lors de ma présence en terre guyanaise. Une coopération renforcée entre les autorités françaises, brésiliennes et surinamaises. Il semblerait que ces opérations portent quelque peu leur fruit, et le président de la République Nicolas Sarkozy a dans ce sens confirmé que l'opération Harpie deviendrait permanente sur le territoire de la Guyane, alors que les négociations avec le Brésil pour une meilleure coopération sont en cours. Le débat souligne également l'opacité du circuit de l'or en Suisse, l'existence évidente de financeurs, réels mafieux tirant leur épingle du lot en exploitant la majorité de ces garimperos ouvriers à la simple recherche d'un avenir plus doré. Un milieu assez pourri, comme le synthétise cette dernière réalité: la Guyane exporte plus d'or qu'elle n'en produit ! 

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13 février 2010

France/Guyane - Les îles du Salut: enfer, Club Med et paradis tropical

Le courant des Guyanes transporte jusqu'à 20% de la charge sédimentaire de l'Amazone et entraîne la formation des bancs de vase qui donnent naissance à la couleur chocolat des eaux du littoral guyanais. Mais à quelques kilomètres de ces littoraux marrons surgissent trois petites îles déchargées de sédiments mais chargées d'histoire. Aujourd'hui sources de sorties dominicales, les îles du Salut furent aussi un lieu de rétention, de souffrance et de mort durant plusieurs décennies, en accueillant une partie des bagnards envoyées en Guyane. D'où la qualification d'Albert Londres à propos de ces îles: l'enfer dans le paradis. Toutefois, en 2009, les îles du Salut offre à l'habitant de Guyane une solution intéressante de dépaysement et de détente, tout en alliant promenade culturelle (visite guidée du bagne) et naturelle (balade possible sur deux îles sur trois). Après un transfert d'environ 1 heure par catamaran, durant lequel il est parfois possible d'observer dauphins et tortues, l'arrivée sur l'île royale se fait en douceur et laisse présager du dépaysement que peut procurer la plus grande des trois îles.

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Les îles sont propriétés et donc entretenues par le CNES, le Centre National d'Etudes Spatiales, depuis 1971. Les bâtiments du bagne de l'île royale ont été réhabilités en partie et permettent aux pensionnaires quotidiens de visiter ces lieux à l'histoire terrible. Guidés par un historien amateur passionné, c'est ainsi que nous débutons cette journée du 2 août 2009, après une première série de photos animalières et paysagères. Les deux splendides aras sont apprivoisés, tout comme l'était ce beau toucan échappé d'une cage et qui ne peut voler jusqu'au continent. Un réel plaisir que de le voir boire en compagnie d'iguanes, dans une marre à caïmans.

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La visite du bagne de Guyane offre une opportunité passionnante de mieux comprendre cette terrible sentence. En plus du guide passionné, c'est surtout la revue Géo n°93 de novembre 1986 qui explique bien cette période terrible, à travers l'histoire de l'un des bagnards, nommé Dubuz, relaté par un journaliste de l'époque. "En fait, l'histoire de Dubuz était banale. Fin de la première guerre mondiale. Un jeune libéré rentre dans son petit village de Normandie. Bientôt, il s'imagine dans les bras de sa femme, la couvrant de baisers. Mais un autre est là. A ce moment du récit, le vieil homme avait plié les doigts en forme de revolver: "j'ai tiré! L'homme est tombé tout de suite, mort, complètement mort." Vrai crime passionnel, ou, comme souvent chez les anciens bagnards, biographie inventée de toute pièce pour donner une cause plus noble à sa condamnation. Peu importe. Dubuz s'est retrouvé en Guyane, dans l'enfer du bagne, un cliché littéraire auquel je ne peux échapper qu'en ayant recours à l'argot coloré des forçats: Dubuz s'est vu condamné à la guillotine sèche, numéro parmi les numéros. Dubuz et son tricycle demeurent une photographie à jamais gravée dans mon cerveau. Lui et la poignée de "vieux blancs" qui s'éteignent l'un après l'autre dans les hôpitaux de Cayenne, aujourd'hui préfecture de la Guyane française, ou de Saint-Laurent-du-Maroni, sont les éclopées en loque d'une armées vaincue. Le savent-ils eux mêmes ? En venant en Guyane, ils arrivaient pour purger leur peine, se mettre en règle avec la société et, si possible, avec leur conscience. Mais ils étaient aussi les soldats d'une troupe qui avait reçu mission de transformer la Guyane en eldorado."..."Au total, entre 1852 et 1938, soixante-dix mille hommes furent convoyés en Guyane. Comme toutes les troupes en campagne, cette armée eut ses morts. Une véritable hécatombe: plus de la moitié des effectifs !" Ma tête et internet complètent cette brève synthèse: Alfred Dreyfus (1894), Guillaume Seznec (1923) furent les prisonniers les plus célèbres du bagne. Francis Lagrange, bagnard artiste, peint une série de toiles sur ce terrible monde. L'abolition du bagne de Guyane fut proclamée en 1938 mais réellement mise en oeuvre en 1947. 1947 ? Dans le contexte de la découverte de camps de concentration nazis, il devint délicat de tolérer l'existence de ce camp équatorial dont le taux de mortalité était du même ordre de grandeur.  

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Hôpital du bagne des îles du Salut

Un changement n'arrivant jamais seul, la fin du bagne en 1938 correspondît à la création des congés payés en France, et par effet domino, le développement du tourisme de masse. Après le départ des gardiens du bagne et de tout ce qu'il générait, violence, maladies et mort, le tourisme s'est petit à petit développé sur les îles du Salut ! Et d'autres gardiens ont été embauchés, pour s'occuper de ces venues dominicales ! D'où ce doux surnom donné aux postes de gendarmerie des îles du Salut, comparé à la réalité de la Guyane continentale et à celle du bagne: le club-med de la gendarmerie en Guyane !  

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C'est bel et bien dans un endroit paradisiaque que les hommes débarquent en 2009. Laissons le passé au passé, et promenons-nous un peu sur l'île royale, la plus grande et la plus fréquentée des trois îles. Une balade aux alentours de l'auberge débute par l'observation des agoutis, ces rongeurs comestibles, du toucan ainsi que de l'île du diable, sur laquelle à séjourné Dreyfus.

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Vue de l'île du Diable depuis l'île royale

Puis, après ce petit tour autour de l'auberge, c'est le tour de l'île que nous faisons maintenant. un tour par des petits chemins de terre bordés de cocotiers, à côté d'une eau bleu-verte à 29°C. Des sentiers très photogéniques, une petite baignade agréable, et un bel après-midi au fil de l'eau.

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Cette promenade est très sympa. Le microclimat, légèrement plus sec, devient plus agréable que sur le continent, pourtant à quelques kilomètres. La possibilité de plonger dans cette eau chaude est verte offre est aussi un petit plaisir. Mais voilà, pour avoir pris un aller-retour sur une journée, il nous est impossible de rester plus longtemps, et notamment de visiter l'île Saint-Joseph, sur laquelle les vestiges du bagne n'ont pas été réhabilités. Aussi, c'est en redescendant tranquillement vers le port que je tombe nez-à-nez avec une bande de sapajous. Habitués à l'homme, ils sont preneurs de toute friandise que le promeneur peut laisser. Ces îles sont une étape incontournable de la Guyane touristique. Plus accessibles sur le plan financier que d'autres sites naturels du département, elles assurent un dépaysement garanti à toute personne, de Guyane ou d'ailleurs. A visiter, sans oublier le hamac, bien sur !

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Sapajous, une des espèces de singe présente sur l'île

28 janvier 2010

France/Guyane - In tropical tartiflette I don't trust

"La France est un des derniers pays européens qui ait le privilège d'héberger en son sein des identités territoriales et culturelles fortes. C'est le cas dans l'Hexagone avec la Corse, l'Alsace, le Pays basque...Outre-mer, ces identités sont encore plus marquées, étant le produit de cette histoire d'une rare violence mais aussi d'une époustouflante fraternité, d'une grande complexité au regard de leurs trajectoires sociologiques." Cette phrase, que je tire de l'interview de Christiane Taubira, député guyanaise, retranscrite dans l'excellent hors-série du Monde sur la France d'outre-mer, conforte les approches culinaires que j'ai pratiqué pour mettre en valeur mon identité savoyarde. Aussi, deux grands idéaux se cachent derrière cette valorisation culturelle: 

-L'espoir qu'un jour je cuisinerai des tartiflettes à des personnes sud-américaines.

-L'espoir qu'un jour, le monde sera plus égalitaire et permettra à davantage de sud-américains de venir manger des tartiflettes en Haute-Savoie.

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"In tropical tartiflette I don't trust"

La question de fond de cet article n'est en fait pas de savoir si mes tartiflettes étaient bonnes ou avec qui je les ai mangé, mais plutôt de comprendre dans quel cadre ces produits de Haute-Savoie se retrouvent dans les surfaces commerciales de la Guyane, ou encore comment une certaine politique économique a des conséquences sur le pouvoir d'achat des habitants des DOM-ROM. Hé oui man, comment un reblochon du 74 peut il se retrouver dans le 973 ? Comment le dieu du fromage peut il accepter de proposer une telle variété de fromages dans les supermarchés de Guyane, tous produits en métropole ? Pourquoi vendre des reblochons à 33 euros/kg alors que la production locale mériterait d'être développée ? Pourquoi cela, alors que les transports générés sont coûteux et polluants ?

Jamais, non jamais je ne m'étais posé autant de questions pour un reblochon.

Christiane Taubira l'indique dans cette même interview: "les prix et le pouvoir d'achat sont des révélateurs. La vie est chère en outre-mer, parce que le système est organisé selon des mécanismes inflationnistes: la surrémunération des fonctionnaires (prime de 40%), le maintien de l'économie d'importation, les lois de défiscalisation." Cette mondialisation appliquée à France ultramarine aboutit à des réalités ahurissantes: dans les Antilles françaises, la grande distribution fait venir des produits d'Europe ou d'ailleurs et les vend deux fois moins cher que ceux produits localement. La canne et la banane, économies subventionnées, servent à nourrir la métropole avant la Guadeloupe. Le sucre est raffiné sur le continent, avant d'être revendu dans l'île. L'eau en bouteille, comme la Didier (Martinique), reviennent plus cher que les eaux qui prennent leurs sources dans les volcans d'Auvergne ou en Savoie.

Nombre de produits sont aussi échangés avec les Antilles françaises. Toutefois, ce livre souligne le contexte géopolitique particulier de la Guyane, avec d'une part une contestation de la dépendance à l'égard des Antilles, et d'autre part la volonté d'ancrage sud-américain. Ainsi, le livre, écrit il y a une dizaine d'année, souligne (à juste titre ?) qu' "il n'y a pas chez les responsables guyanais de volonté de renforcer les liens avec les Antilles qui sont perçus comme se faisant au détriment de la Guyane, en relation avec le fait que la société guyanaise dans son ensemble montre un refus de toute dépendance à l'égard des Antilles. Ce sentiment s'est renforcé et s'est trouvé conforté par la réalité elle-même, le meilleur exemple étant constitué par les évènements d'octobre-novembre 1996 qui ont abouti à la création du rectorat de la Guyane, mesure qui s'est avérée indispensable autant sur le plan du symbole politique que de l'efficacité administrative. Ce sentiment ne vaut d'ailleurs plus seulement pour les structures administratives mais aussi pour les relations économiques et les critiques ne manquent pas vis-à-vis de l'institution du marché antillo-guyanais. Il n'y a, pour autant, de façon générale, aucune acrimonie ou difficulté d'intégration des Martiniquais ou des Guadeloupéens installés en Guyane mais simplement la volonté de voir la Guyane reconnue pour elle-même et non comme un appendice administratif ou économique des Antilles." 

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L'intégration au continent sud-américain parait nécessaire au département comme le cite le même livre: "l'appartenance géographique de la Guyane, fait que son horizon sud-américain, ses contacts immédiats avec les réalités du monde amazonien et les pays du plateau des Guyanes sont des facteurs essentiels d'intégration et de progrès de ce département. Etant en prise directe avec le Tiers-Monde (je recopie) la Guyane ne pourra pas se développer en dehors de son environnement proche et seule une politique active de coopération régionale constituera une condition de stabilité et par conséquent d'essor de l'économie guyanaise."

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Toutefois, dix ans après cet mots, la viande du Brésil passe toujours par la métropole avant de repartir en Guyane...Acheter les produits locaux: un raisonnement économique, social et environnemental de plus en plus mis en valeur en métropole, mais aussi dans les DOM. C'est mieux ainsi, même si je n'ai pas montré l'exemple, en l'occurrence.

10 janvier 2010

France/Guyane - Back to Cacao !

Un dimanche ensoleillé du mois d'août et en compagnie familiale est une très bonne raison de passer une nouvelle journée dans le petit village rural de Cacao, que je vous avais présenté dans un article précédent. La route n'a pas changé, mais un grand évènement va faire en sorte qu'elle change. Le plan de relance de notre gouvernement de l'économie française mis en place par notre gouvernement. Hé oui, la réhabilitation de la route de Cacao, particulièrement en mauvais état, va être financée dans le cadre de la relance économique, malgré un certain scepticisme des agriculteurs du village. La route est ainsi toujours aussi défoncée, d'où un certain nombre de ralentissements permettant à l'oreille du naturaliste d'entendre le plus fameux sentinelle de la forêt équatoriale: le Païpayo. L'équivalent du geai des chênes européens, qui, les promeneurs le savent, prévient toute la forêt de la présence d'intrus sur le territoire. La route est toujours défoncée, le Païpayo est toujours aussi bon gardien de la route, et le château de Tolkien est toujours en voie de disparition sous les plantes grimpantes.

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Un peu plus loin, la vue, toujours aussi imprenable, permet au promeneur de sonder l'intérieur guyanais, une forêt encore relativement bien préservée, malgré des graves menaces telles que l'orpaillage clandestin. Cette forêt, qui doit rappeler à mes grands-parents, adeptes de ce blog et que je salue, leur production de choux-fleurs, est envoutante. A une première couche de rouge s'étend de multiples verts sous le soleil équatorial...en gros, c'est joli !

 

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Nous arrivons ensuite à Cacao, qui dépend toujours de la commune de Roura.

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La balade au sein du village est toujours aussi agréable, et constitue un vrai coup de cœur dans ce département étonnant. On s'y balade le cœur tranquille, sous un soleil de plomb, commençant par le marché chaque dimanche matin, discutant avec certaines personnes hmongs arrivées ici dès le début, à la fin des années 70, alors qu'en ce début d'année 2010, d'autres personnes hmong sont encore dans des camps de réfugiés en Thaïlande, certains venant même d'être  ramenées au Laos. La balade est l'occasion de s' approvisionner en artisanat hmong, puis de retourner à l'éco-musée.

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Ce village offre en plus un panel important de plantes décoratives tropicales, fleuries ici ou là.

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Après cette première partie habituelle de journée, la découverte de certains champs agricoles, en direction du sentier de Molokoï, permet d'avoir plusieurs points de vue agréables sur le village, en pleine Amazonie.

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L'église de Cacao, en plein cœur de l'Amazonie guyanaise

La journée file au fil des sentiers de ce charmant bourg, et le retour, sous le soleil descendant, offre de très belles opportunités photographiques.

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Mais le summum de la journée pour ma petite âme de naturaliste amateur, arrive alors qu'un énième jeu de couleurs sur la forêt nous poussait à faire escale en bord de route. Une escale totalement dépaysante, car alors que l'appareil se pose sur mon œil, c'est bel et bien mon oreille qui est sollicitée. En dessus de nous, en dessus de cette forêt  amazonienne, des centaines de perroquets, tous de la même espèce, possiblement des piones à tête bleue, selon un passionné questionné, volent en petits groupes de quelques individus, pendant de nombreuses minutes. Un moment génial, qui me laisse admiratif de cette belle nature. L'Amazonie dans toute sa splendeur. Leur chant est net, et le soleil se couche tranquillement sur cette superbe observation inattendue. Les photos valent ce qu'elles valent, mais ce souvenir restera gravé de longues années.

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Population de perroquets (pionus menstruus ?) en vol au dessus de la forêt amazonienne.(Attention à ne pas confondre les perroquets avec les tâches de saleté de votre écran !)

9 janvier 2010

France/Guyane - Une (première) année à Cayenne

Ma vision de Cayenne, préfecture d'environ 60 000 habitants, a évolué au fil des mois. Sa taille intermédiaire, son architecture, la découverte de lieux de sortie variés, le métissage de ses habitants, la variété des milieux naturels qui l'entourent, la possibilité de suivre des conférences et autres soirées thématiques: sans hésiter, je la préfère à la ville spatiale Kourou, et même à Saint-Laurent-du-Maroni, trop loin de la mer et trop petite. Certes, Cayenne reste une ville assez calme, à la différence d'une Paramaribo (Suriname) ou d'une Oiapoque (Brésil), mais elle offre bien plus de possibilités que ses deux consœurs guyanaises. Il m'a juste fallu un certain temps d'adaptation, de découverte et "d'autocritique", pour apprécier la ville.

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Braderie de Cayenne 2009

Son marché. Un marché de grande taille permet au tout Cayenne de se retrouver après une semaine de travail. Petite généralité certes, mais faisant image au caractère assez rural de cette préfecture, et de la Guyane dans son ensemble. Aussi, le marché est le lieu de rencontres des agriculteurs hmongs ou créoles principalement, des vendeurs de boissons aux parfums alcoolisés, d'épices, de fruits de mer, ou encore d'objets d'arts, comme c'est le cas de ce vendeur haïtiens (peintures d'art naïf).

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Architecture et urbanisme. Une ville disposant de nombre de cases créoles, soit les maisons traditionnelles construites au fur et à mesure de l'histoire créole de la Guyane.

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Une rue du centre-ville

Ces cases créoles ne possèdent par exemple pas de fenêtres vitrées dans les baies, uniquement des volets en bois, des jalousies, qui protègent des intempéries. Une autre caractéristique architecturale est l'utilisation de tôles pour le toit, et parfois les murs. Le bois est bien sur amazonien. Aussi, certaines rues du centre-ville abordent un jeu de couleurs variées, au fil des façades des cases. Un vrai plaisir pour le photographe.

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Enseigne d'un (commerce) chinois, très courants en Guyane

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La place des palmistes, centre-ville

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Vue depuis le fort Cépérou

L'île de Cayenne: les plages. La grande banlieue de Cayenne (l'île) offre plusieurs kilomètres de plages dont je vous ai parlé dans des articles précédents. Des plages qui furent, pour l'habitant des Alpes que je suis, sources de plaisir dominical. Un réel changement que de faire quelques mètres avant de se retrouver sur ces plages sauvages et agréables.

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Plage de Zéphir (réglage crépuscule)

L'île de Cayenne: photos anecdotiques. Des photos anecdotiques, prises ici et là dans la banlieue de Cayenne, au fil d'une riche année de découvertes tant professionnelles que personnelles.

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Maison créole en cours de réhabilitation, Montabo

Et puis il y a ces fresques murales, à Suzini, représentant des scènes de vie passée dans la commune de Cayenne, en extérieur ou au sein d'une case. Un vrai régal à photographier et à regarder, même si elles mériteraient d'être davantage mises en avant.

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Une (première) année à Cayenne, c'est une chouette expérience de vie !

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2 janvier 2010

France/Guyane - Ecologie: les salines de Montjoly

Les salines de Montjoly: une diversité d'écosystèmes connectés sur une faible distance, pour le plus grand plaisir des promeneurs, naturalistes et autres écologues! Située à 10 km du centre-ville de la préfecture, cette zone de promenade habituelle des habitants de l'île de Cayenne permet en effet de découvrir plusieurs milieux protégés. Cette zone n'a jamais été aménagée pour l'exploitation de sel, malgré son nom, et est préservée notamment grâce aux actions du Conservatoire du littoral. Zone humide remarquable, elle peut être découpée transversalement selon le schéma suivant (provenant d'un mémoire étudiant):

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Alors c'est parti pour une balade accompagnée de commentaires issus notamment du site web consacré aux salines...C'est tout d'abord en longeant le sentier situé en bout du cordon dunaire, constitué d'une végétation typique, que la balade commence...végétation typique des milieux sableux, notamment ces fameuses ipomées très présentes sur les plages de Cayenne, et qui jouent un rôle important dans la stabilisation du cordon, à la fois sur les plans géotechnique et éolien.

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Ipomées. Les racines, qu'on aperçoit grâce à la tortue qui a creusé le trou, stabilisent l'ensemble du cordon dunaire, peu ou pas attaqué par l'érosion des vagues.

Le sentier, situé en plein cordon sableux, offre la possibilité d'observer une faune et une flore intéressante. Ipomées donc, mais aussi divers types de palmiers. La faune est également particulière, tant l'avifaune (anis, tyrans) que l'on peut observée à  gauche, ou cette tortue olivâtre à droite.

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Faune et flore du cordon dunaire ne seront pas identiques à celles de la mangrove ou des marais

Le sentier continue et nous amène progressivement au marais d'eau douce situé plus à l'intérieur des terres. Au moment de la balade, en début de saison sèche, le marais prédominant est un marais à Eleocharis mutata (lagune). Il est possible d'y voir une flore composée de nénuphars, de jacinthes d'eau ou encore de lentilles d'eau. La faune y est également différente, avec de nombreux limicoles (aigrettes par exemple) et des passereaux. Le deuxième  type de marais rencontré est tourbeux à végétation herbacée.

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Le chemin se poursuit et nous amène maintenant sur une voie aménagée en plein cœur d'une mangrove. La seule voie aménagée au cœur d'une mangrove en Guyane. Cet écosystème abrite plusieurs espèces de palétuviers, et a la particularité d'être soumis aux flux de marées. Aussi, elle présente un substrat gorgé d'eau, instable, salée et pauvre en oxygène.

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Cet écosystème est étroitement lié aux bancs de vase. Forêt mobile couvrant la majorité du littoral guyanais, elle disparait en même temps que les mouvements du substrats vaseux, pour se former plus loin, à partir de la dissémination des graines de palétuviers par flottaison.

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Un moment saisissant, qui nous amène à l'exutoire ouvert, liant les eaux des salines aux eaux océaniques, et ainsi à la fin du sentier. Le retour par la plage peut être, en ce mois d'août, l'occasion d'observer des émergences. Cette balade est très intéressante. Facile d'accès, très tranquille, elle offre une belle solution de promenade du dimanche pour petits et grands. Elle permet également d'observer différents milieux liés en termes écologiques et hydrauliques, comme le montre les schémas ci-dessous. A ne pas manquer.

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Fonctionnement hydraulique (saison des pluies)

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Fonctionnement hydraulique (saison sèche)

20 décembre 2009

France/Guyane - Une journée à Montsinéry-Tonnégrande

Montsinery: petite commune rurale à proximité de Cayenne et en pleine expansion. Une commune composée également du bourg de Tonnégrande, mais ce n'est pas là, que je passais une belle journée, la première de mes vacances estivales d'août 09 en compagnie de mes parents, fraîchement débarqués de France métropolitaine pour découvrir la Guyane. En plus, Marion, une amie de longue date, elle-aussi en vacances à Kourou, et voilà 5 hauts-savoyards en force pour découvrir le bourg, sa crique et son zoo. Un bourg assez typique des autres bourgs ruraux de Guyane, et agréable à visiter. Mais comment mieux commencer cette journée que par une baignade à la crique patate, belle, naturelle et très prisée le week-end, paraît-il. Un petit arrêt pour apprécier la verdure d'une culture fourragère devant une végétation luxuriante splendide, et nous y sommes!

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Comment mieux débuter des vacances en Guyane qu'en mangeant en terrasse au bord du fleuve traversant le bourg. Un vieux rhum pour déguster des plats de recettes locales, alors qu'un pêcheur semble vérifier ses prises au filet.

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Découvrir le zoo de Guyane, une possibilité unique d'apercevoir dans une même journée nombre d'espèces fameuses d'Amazonie, et toutes les légendes qui en découlent. L'occasion de faire une petite balade dans une canopée de petite taille, de voir différentes espèces de mammifères arboricoles, de plantes, d'oiseaux...et de découvrir quelques animaux parmi les plus grands prédateurs d'Amérique du Sud. Hé oui, en effet il n'est pas si habituel de découvrir de beaux serpents, caïmans et autres félins dans la nature, mais quelques anecdotes, entendues de mes propres oreilles, valent le détour.

Le Jaguar. Plus grand félin d'Amérique, il est un des autres animaux sur lequel travaille l'association kwata. Se rappeler qu'il s'agit d'un des prédateurs de la tortue luth, à même les plages, laisse l'interlocuteur l'imaginer au bout de son jardin, à l'orée de la forêt. Et ce n'est pas faux. Combien d'anecdotes ai-je entendu à propos de rencontres entre l'homme et le jaguar? Parmi les plus étonnantes, les plus inquiétantes devrait-on dire, que penser de cette histoire d'école, ou l'ensemble des gamins sortant de leur classe, dans une école du fleuve Maroni, se retrouvèrent dans la cour en compagnie d'un jaguar? ou comment ne pas vivre l'émotion d'une personne se retrouvant face à lui. L'homme et le jaguar...Mon pote de kwata n'en a pas peur, même s'il le dit: entre nous, c'est lui le maître. En ayant  "bénévolé" avec des tortues, moi je me disais plutôt: entre nous, c'est moi le maître. Hé hé ! Ceci dit, la palme de l'anecdote reviendra à cet autre salarié, qui, courant novembre 09, lors d'une sortie "jaguar" justement (pose d'appareils photos selon un échantillonnage précis en forêt) tomba nez à nez avec un spécimen l'observant à quelques mètres alors qu'il était accroupi, le pantalon baissé... Ce jour là, il a dû, pendant quelques secondes certainement très longues, se rappeler du sketch de Bigard, "les grands moments de solitude"! Plus sérieusement, certains connaisseurs, dont mon pote technicien de kwata, affirment que ce félin n'est pas réellement à craindre. Plus curieux qu'autre chose, il est fréquent qu'il ait été pris par les appareils photos de kwata seulement quelques minutes après que ceux ci aient été installés...regarde bien derrière toi, car le jaguar, lui, sait où tu es !

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L'anaconda. Autre grand prédateur sud-américain, le plus grand serpent du monde peut en effet être très grand, comme le montre cette photo trouvée sur la toile (ici).

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Aucun spécimen observé en un an de Guyane, mais ce n'est pourtant pas si rare que cela...pour le voir, il faut savoir vivre près des criques! Aussi, lorsque vous sentez une odeur de poisson à proximité d'une rivière, pensez "anaconda à proximité" et non pas "acoupa sauce maracudja"! Hé oui, il dégagerait une odeur typique. Bon à savoir donc ! Dans le village amérindien de Trois-Sauts, reculée en pleine forêt et ou j'ai eu l'inestimable chance d'aller dans le cadre de mon année de volontaire civil, il est assez fréquent de voir ces serpents sources de légendes. Mais, pour relativiser les "on dit" ou plutôt les "on suppose après avoir vu un énième film épouvante à la con", il n'y a pas eu d'attaques de l'espèce sur les habitants du village depuis des années, alors que l'ensemble des personnes s'approchent des eaux du fleuve probablement quotidiennement. De quoi relativiser le danger. Le spécimen du zoo était quand à lui bien réveillé...même pas peur ! 

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Deux grands prédateurs d'Amazonie, rencontrés au fil de la balade parmi de nombreuses espèces de la faune de cette région à grande biodiversité: tortues, serpents et autres reptiles, mammifères (tapir, tamanoir, coatis roux etc), singes (atèles, tamarins, capucins etc).

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Podocnémide géante, plus grande tortue du sous-continent sud-américain

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  Coatis roux, cousins sud-américains du raton laveur

Et puis bien sur, de nombreux oiseaux, allant des perroquets aux grands aigles amazoniens. Parmi ceux-ci, citons tout particulièrement le Harpie féroce, énorme aigle de la forêt amazonienne et oiseau emblématique de la Guyane, au même titre que l'ibis rouge ou les toucans. Emblématique, mais difficile à observer dans la nature. Ce rapace, l'un des plus puissants, splendide, est capable de dévorer des proies de tailles acceptable: aras, iguanes, agoutis...et même paresseux. Pour le naturaliste, un appeau possible du paresseux peut justement être le cri de cet aigle.

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Harpie féroce, un des plus puissants aigles du monde

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Caïque Maïpourri, petit perroquet amazonien

Cette petite commune rurale du bassin de Cayenne offre ainsi un certain nombre d'opportunités au visiteur d'un jour: baignade en crique ou fleuve, balades dans le bourg, en savane ou en forêt, gastronomie de qualité et zoo. Une étape à ne pas manquer, pour tout habitant et tout vacancier de passage.

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23 octobre 2009

France/Guyane - Une recette: crevettes au lait de coco et gingembre

Petit article culinaire pour vous conter l'unique recette de cuisine "locale" apprise en un an ici. La cuisine n'est toujours pas mon centre d'intérêt principal, mais ca me plait de plus en plus! La pêche crevettière est une des ressources de ce département. Des crevettes délicieuses. Quant à la cuisine guyanaise, elle est riche, variée et de grande qualité. La préparation des crevettes au lait de coco et gingembre se fait par étape.

- Prendre du Rhum, du citron vert et du sucre. Se préparer un premier Ti-punch.

- Préparer la sauce: faire revenir oignons, persil, cives. Mélanger, brasser, et boire le Ti-punch. Une fois l'ensemble revenu, mélanger avec du lait de coco, puis le gingembre et l'ail. Boire un deuxième Ti-punch et rigoler en regardant la sale gueule des crevettes. Les séduire verbalement, pour qu'elles soient plus douces à manger: "t'as de beaux yeux tu sais".

- Arracher la carapace. Le Ti-punch fini, se resservir un verre. Attention, ne pas le confondre avec le lait de coco: ne pas le verser dans la marmite, mais dans le verre. Il est aussi possible de faire une blague aux invités en faisant macérer les crevettes dans le Tit punch et non pas le citron. Rigoler en imaginant leur tête.

- Verser l'ail, le gingembre et un peu de sauce tomate. Rigoler Bêtement (sans raison).

- Verser les crevettes dans la sauce en ébullition. A ce moment là, chanter de tout son cœur Hugues Aufray:

"Non, non, non, ne rougis pas, non, ne rougis pas
Tu as, tu as toujours de beaux yeux
Ne rougis pas, non, ne rougis pas
Tu aurais pu rendre un homme heureux" Tu vas vraiment rendre un homme heureux"

- Boire un nouveau Ti-ponche, enfin punch, bref comprendre le sens de la phrase.

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- Préparer le riz, idéalement du riz surinamais. Eviter l'Uncle Benz. Attention à ne pas oublier le 4ième Ti-punch. Faire cuire le riz dans une rizeuse, pas une rizière, ou pas directement dans le plat.

- Une fois que le plat est prêt, l'apporter aux invités. Attention à ne pas se faire agresser par le chat ou à ne pas casser des verres. Boire un nouveau Ti-punch, et savourer ce bon repas.

J'ai appris cette recette en compagnie de Lola et en invitant Hervé, deux compères que vous pouvez voir sur ces quelques photos.             

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- Finir le repas par un mélange de fruits tropicaux et..un ti-punch bien sur! Bon appétit !

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22 octobre 2009

France/Guyane - Bénévolat "Tortues": synthèse d'une belle expérience !

Apprendre à protéger l’environnement assis sur une chaise d’école dans le pays le plus compétitif du monde est une chose, agir concrètement pour la protection de la nature dans un DOM à forte biodiversité mais où ¼ de la population vit avec moins de 500 euros par mois est également une source de réflexion intéressante. Aussi, je tenais lors de ce séjour à me faire une expérience de terrain et à visée naturaliste, et c'est dans ce but que je rejoignais l’association Kwata, qui s’occupe notamment d’un programme de conservation des tortues marines de Guyane. Une activité bénévole ponctuelle mais régulière, les samedi et/ou dimanche matin entre avril et août. Profiter des kilomètres de plages de Cayenne à allure vive tout en faisant une action à priori utile, apprendre à connaître l’écologie de ces espèces en voie d’extinction et absentes des plages de l' Europe continentale, créer un réseau de contacts dans le milieu associatif de Guyane, et essayer de voir cette problématique dans le contexte sud-américain: voilà quels étaient les buts de cette expérience atypique et enrichissante.   

 

Découvrir les plages de Cayenne et Montjoly

8 km de plages à contrôler tous les matins par le salarié de l’association, et les bénévoles. L’objectif: compter le nombre de sites de ponte de la nuit. Le comptage des sites et donc des tortues venues pondre sur une nuit et à terme une saison permet de voir les évolutions au fil des ans, et n’est bien sur qu’une des composantes du programme de conservation. Ces plages de l’île de Cayenne: naturelles, préservées, authentiques: s’y promener tôt le matin est un de ces petits bonheur que la vie guyanaise peut offrir. Bien sur, ce ne sont pas les plages touristiques des antilles, mais cette préservation et cette authenticité les rendent plus qu’agréables. 

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Le dernier week-end de juin: exceptionnel !

Exceptionnel car riche en évènements insolites. Le vendredi soir, dédié à une soirée d’animation des plages auprès du grand public. Après une discussion à la tonalité élevée avec un ami sur le rôle et l’utilité de ces association naturalistes, je découvrais les joies d’une première expérience dans l’animation des sites de pontes en binôme. Objectif: expliquer aux promeneurs les différentes étapes de la ponte, et plus généralement l’écologie des tortues marines et les mesures prises pour les conserver. Soirée enrichissante, qui me permit de discuter avec de nombreuses personnes, la majorité très à l’écoute et désireuses d’en savoir plus, qu’elles soient métropolitaines, guyanaises ou antillaises, de passage ou installées ici. Des animations ainsi utiles, à condition de ne pas faire la police et de prévenir avec le sourire. Soirée animation, mais ce n’est pas tout. Découverte du marquage des tortues olivâtres, programme financé par l’Europe et le WWF notamment et qui a pour but de développer les connaissances sur l'écologie des olivâtres, la plus petite des 7 espèces de tortues marines dans le monde. Le marquage d’une tortue olivâtre, une petite maîtrise à développer, mais réservé aux salariés. Pour ou contre? Mon seul avis est que cette espèce est également très menacée, que la Guyane possède des moyens et est un lieu de ponte primordiale pour cette population en Amérique du Sud: alors pour! Une facette du programme de conservation probablement utile à la vue des analyses qui ressortent déjà des données produites. Animation, assistance au marquage, et découverte en quelques minutes des trois espèces de tortues guyanaises (luth, olivâtre et verte) en train de pondre à quelques mètres d'intervalle. Beau moment nature, sans aucun doute.

Samedi matin: comptage des sites de pontes de la nuit, différenciation entre les espèces, évaluation des traces, comptages des demi-tours, parfois de nids ou individus attaqués par des chiens errants (photos 1 et 2) ou braconnés (photo 3). Deux menaces anthropiques, parmi de nombreuses autres: attaque des nouveaux-nés par les ratons crabiers, par les urubus (photo  4),  la buse buson (photo 5, notez la tortue dans la serre de gauche), puis, dans l’eau, par les dauphins (photo 6), poissons et autres dents de la mer. Le nid en lui même est parfois érodé par les vagues ou déterré par d’autres tortues en train de pondre.

 

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Nid en voie de destruction par l'érosion des plages

 

Mais en plus d’une matinée ordinaire, le téléphone sonne et nous voilà embarqués dans le sauvetage d’une tortue luth adulte. Hé oui, encore une menace que sont les enrochements des plages. Cette tortue, de belle taille, s’est retrouvé en dessus de l’enrochement et est allé droit vers la mer après la ponte. Résultat: coincée sur une roche et éraflée par le frottement contre les pierres.

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La solution : lui passer une corde sous les nageoires et tirer pour faire pivoter ses 400 kg et la remettre dans la bonne direction.  Une petite synthèse de cet étonnant sauvetage est écrite ici et se résume dans les photos ci-jointes.

 

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Tortue sauvée, et tout le monde en était content...ma petite synthèse à moi se trouve dans la photo ci-dessous, que je dédicace à certains potes qui se reconnaîtront!

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La matinée continue, et me voilà cette fois nez-à-nez avec la vie dans toute son évolution: de l’œuf à l’adulte en passant par les bébés émergents. La tortue, en pondant, a en effet déterrée des bébés et des oeufs !

 

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La vie extramarine: quand l'une dort, l'autre pleure !

Quelle difficulté pour ces reptiles marins de trainer leur poids sur le sable et d'affronter un moment de risque très important. L'effort physique est important, notamment pour les tortues Luth, qui doivent trainer 400 kg. Cette tortue, grande nageuse capable de traverser l'atlantique ou de remonter jusqu'aux côtes du Canada depuis ici, a la particularité de souffler fortement et "pleurer" lors de ses pontes. Il s'agit en fait d'un mucus produit par des glandes occulaires et qui lui permet de les lubrifier et surtout d'éliminer l'excédent de sel de son corps qu'elle accumule dans l'eau. L'une pleure...et l'autre dort ! La tortue olivâtre, qui avec son poids d'environ 36 kg et sa petite taille, est bien plus rapide sur le sable, a la particularité de parfois s'endormir pendant la ponte !

 

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Tortue olivâtre endormie sur son trou...vous, ça vous est déja arrivé ? :)

 

Cette tortue, peureuse, possède un comportement grégaire. Parmi les différentes stratégies de ponte connues chez les tortues marines, celle-ci est la plus impressionnante. Dans les régions du monde où elles sont très présentes, leur comportement grégaire se traduit par la sortie simultanée de plusieurs dizaines à milliers de femelles la même nuit, sur le même site. Ce phénomène, appelé arribada, peut être observé notamment sur les côtes du pacifique d'Amérique Centrale. En Guyane, le nombre de tortues est bien plus faible, mais des petits pics de ponte existent.

 

 

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Les émergences: en route pour l'aventure !

L’émergence. Naissance d’une vie qui sera souvent très courte. 1 tortue luth sur 1000 arrivera à l'âge adulte, et en tenant compte des facteurs anthropiques, ce chiffre n'est plus estimé qu'à 1/5000. L'émergence. un beau moment que de voir ces toutes petites tortues avancer à pas de géants vers un océan de danger...trouver l'océan peut déja s'avérer compliqué, ne serait-ce qu'à cause de la pollution lumineuse. C'est sans doute pour cela que ces trois petites Luth sont allées dans la rivière longeant la plage que j'oscultais.

  

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Tortue Luth devant un océan de danger...

 

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Traces de vie sur un désert minéral

 

Réflexions sur la protection des tortues marines en Guyane

Les sorties régulières des matinées de week-end à compter les sites de pontes m'ont permis de rencontrer de nombreuses personnes et d'échanger sur la problématique de conservation des tortues marines en Guyane. Hé oui, car parfois le débat est animé, entre des personnes voyant les naturalistes comme des mains de Dieu ou les personnes, qui, trop alcoolisées, vont jusqu’à monter sur les tortues en train de pondre. Tout le monde n'est pas d'accord sur l'utilité de la protection de ces espèces, dans un DOM ou 90% du territoire est de la forêt primaire domaniale et où le chômage bât son plein. Cependant, j’ai aussi rencontré des personnes des Antilles, de Guyane, du Guyana, du Brésil, totalement pour les mesures de protection et de conservation, et ces personnes là étaient au final nettement majoritaires. Les discussions que j’ai pu avoir étaient intéressantes et vraiment constructives, la plupart du temps. La valeur intrinsèque de ces espèces préhistoriques est évidente, mais il serait erronée d’oublier le rôle culturel, économique et touristique qu’ont joué et que jouent les tortues marines pour la Guyane. Véritable symbole nature de ce département, les voir arriver en nombre de plus en plus élevé sur les plages de Cayenne ne peut pas faire de mal au tourisme, et à la préservation de ces littoraux dont les eaux marrons ne permettront pas d'attirer le tourisme balnéaire en masse. Aussi, je pense que la conservation de ces trois espèces en danger d’extinction est un programme d’utilité réelle pour la Guyane, et certainement pas le contraire. Le braconnage? Un pêcheur guyanien que je connais, braconne parfois une à deux tortues qu'il trouve dans ses filets. Clandestin plus où moins partout ou il est passé, il pense à se protéger avant de protéger la nature. Se protéger, en mangeant une ou deux tortues. En protégeant les espèces naturelles, « ils » nous vendent leur poulet » dit il. D'accord, mais le projet TAMAR au Brésil montre que des solutions alternatives à la pêche artisanale de tortues sont possibles. Ce projet mérite une attention particulière par son envergure et ses résultats. Un exemple de développement basé sur la conservation de la biodiversité. Débuté en 1980 par deux océanographes brésiliens, alors que leur pays était le seul pays du continent américain à ne rien faire pour la conservation de la faune marine, il a permis, semble t'il,  d'améliorer le niveau de vie de nombreuses familles de pêcheurs, par la mise en place de 22 stations de suivi des tortues marines sur une distance de 1000 km de côtes brésiliennes, au sein de 8 Etats. 90% des personnes travaillant aujourd'hui au sein des stations sont des membres originaires de ces villages qui, 30 ans plus tôt, vivaient notamment de la pêche des tortues. En 20 ans, de nombreuses connaissances scientifiques sur ces espèces ont été produites, et c'est près de 8 millions de tortues juvéniles qui auraient été remises à l'eau. Alors, une réussite totale ? Seules les personnes complètement concernées par les retombées économiques de ce projet peuvent vraiment le dire.

 

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Jeune tortue luth sur une plage de Montjoly

 

Dans l’ouest guyanais, un aspect culturel fort vient en plus s’immiscer dans la problématique de conservation des tortues de Guyane à travers l’histoire mêlée entre Awala-Yalimapo et les tortues. Dans cette commune amérindienne, les oeufs étaient auparavant traditionnellement consommés, la chair de tortues utilisée pour la pêche, et les tortues vivantes étaient vendues à l’administration pénitentiaire. Avec la fin du bagne et l’apparition des filets, les personnes amérindiennes arrêtèrent en 1955 de chasser les tortues, mais la consommation des oeufs était alors très fréquente. Puis sont arrivés les scientifiques dans les années 1970. La suite, je le copie-colle de ce bouquin du WWF « la tortue luth » qui cite Daniel William, chef coutumier d’Awala-Yalimapo. « Quand je me souviens de ces premiers efforts, je me dis que personne ne pensait à l’époque que cela allait devenir contraignant pour la communauté. On se disait qu’après quelques années, tout ce suivi allait s’arrêter. Mais autour de ce travail, il y a eu des articles, des publicités, et les touristes sont arrivés. Quand il y a eu l’éclosion de l’écloserie, les gens sont alors venus très nombreux. En parallèle, les équipes se sont renforcées avec des étudiants et des volontaires, et nombreux sont ceux qui ont trouvé du travail en Guyane grâce à cela. Aujourd’hui, les choses ont profondément changé autour de la question des tortues marines. L’administration a interdit des activités qui étaient libres auparavant. On voit maintenant des gens armés sur les plages, on envoie des jeunes qui prélèvent des oeufs au tribunal et notre loi coutumière est contredite par des lois plus récentes. Il existe aussi des retombées positives autour des tortues marines, mais elles sont insuffisantes. Les bénéficiaires sont souvent hors de la communauté, et que laissent les touristes après leur passage ? Il est dommage que les associations locales à Awala-Yalimapo ne se lancent pas dans l’accueil des visiteurs, alors que de nombreux jeunes sont sans emploi. J’espère qu’à l’avenir, les jeunes ne resteront pas oisifs, je souhaite qu’ils s’impliquent. Il faut que les acteurs de la zone appuie ces initiatives, et les orientent. Il y a trop de projets qui ne visent que le court terme. Dans ce domaine, il reste beaucoup de choses à faire.»

 

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Retour à la liberté... 

7 octobre 2009

Suriname - Week-end à Paramaribo

Le Surinam(e). Pays d'Amérique latine. Certes. Ancienne Guyane hollandaise. OK. Mais après? Qu'en est il de ce pays généralement peu connu, peu touristique et souvent mal estimé? Un pays dont l'évocation génère des images floues pour beaucoup de français de métropole. C'était mon cas, avant mon arrivée en Guyane. Une envie bien normale en a découlé: allons y faire un tour! C'est donc le cœur joyeux de découvrir une première capitale sud-américaine que je m'en allais en ce mois de mai 09 avec quelques potes rencontrés grâce à ce beau projet nommé Couchsurfing. Première étape: l'obtention du visa pour le Suriname au consulat surinamais de Cayenne. Quelques difficultés pour accéder à cette petite structure mais visa délivré sous 48 heures: tout va bien. Deuxième étape: organiser le déplacement jusqu'à Paramaribo. Hé oui, il n'y a pas de pont sur le fleuve Maroni assurant la frontière entre les deux pays. La stratégie la plus commune? Après le passage en pirogue, prendre un taxi collectif à Albina, la petite commune frontière et foncer en direction de Paramaribo (Par'bo).

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Les taxis collectifs surinamais. Une crainte. des pointes à plus de 150 km/h parait-il, sur une route de mauvaise qualité. D'où notre idée de préparer cela en avance en payant quelqu'un organisant notre trajet de Saint-Laurent à Par'bo. Une bonne idée, et un trajet finalement tranquille, sous un bon son de reggae. Ouf! Au total: environ 6 heures de route depuis Cayenne. 6 heures...puis le pont: ouvrage d'art construit au début des années 2000, il surplombe Par'bo et nous offre une première vue de la capitale. Le pont, puis la banlieue et ses odeurs d'air pollué. La banlieue, puis le centre-ville et enfin l'auberge.

L'auberge donc. Petit hôtel sympa prêt du centre, et nous voilà plongés dans le pays à travers quelques jolis peintures de personnalités surinamaise. Citons par exemple Anton de Kom, combattant résistant anti-colonialiste.

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Balade en centre-ville. Une partie historique inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO en 2002. Une architecture de qualité, alliant techniques de construction européennes et matériaux sud-américains, hormis quelques briques rouges arrivées en tant que lest des navires hollandais.

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Un centre-ville animé, agréable et en fête en ce week-end synonyme de paye. Animations, concerts, rues bruyantes et pleines de vie, bars aux terrasses pleines à craquer: Paramaribo vit !

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Monuments. Quelques monuments intéressants et quelques anecdotes qui méritent une petite photographie. Ainsi, Mosquée et Synagogue sont tout simplement voisines dans cette ville reconnue pour sa diversité ethnique! Étonnante photo probablement peu commune dans le monde ?

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Marchés. Des marchés variés, à l'image des différentes communautés vivant au Suriname: créoles, hindous, javanais, noirs marrons, amérindiens, chinois principalement. 3 marchés furent visités: le marché principal du centre-ville, le marché javanais et le marché chinois. Trois marchés de taille différente mais très sympa et qui nous permirent de goûter à des plats divers.

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Ainsi, découvrir Paramaribo, c'est découvrir son centre-ville splendide et authentique, ses marchés multiples, ses animations et son ambiance festive, mais aussi des bars où le jazz résonne dans les oreilles, ses casinos, ses shopping de fringues très colorés faisant le bonheur des voisins guyanais, ses grands hôtels pour touristes occidentaux et notamment hollandais, sa pollution, ses déchets. Découvrir Paramaribo, c'est découvrir une vraie capitale.

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Un jour de marché à Paramaribo... (photo de mes cops Dave et Ophélie)

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